En 2019, la journaliste Judith Duportail sort une enquete autobiographique « L’amour sous algorithme » aux Editions en Goutte d’or.

En 2019, la journaliste Judith Duportail sort une enquete autobiographique « L’amour sous algorithme » aux Editions en Goutte d’or.

Elle nous raconte deux histoires simultanement. D’une part, les reflexions et sentiments d’une journaliste trentenaire parisienne qui, suite a une rupture amoureuse, charge la plus celebre des applications de rencontre, et d’autre part l’histoire de Tinder, l’application creee en 2012, qui possi?de revolutionne Notre maniere de faire des rencontres.

De cottonbro provenant de Pexels

Un support pour l’introspection Notre toute premiere histoire reste une affaire sensible et honnete via le rapport a soi, a son image, a l’amour, si on est une jeune femme moderne, feministe mais vivant a l’ombre des belles tours du « male gaze », c’est-a-dire du regard des hommes. Comment gerer le celibat et l’envie d’effectuer des rencontres si on doit aussi passer sous Les Fourches caudines des injonctions sociales detaillant ce qui serait « une vie digne d’etre vecue » tel le dit Judith Butler. Notre recette officielle du plaisir feminin est simple ; celle-ci a d’ailleurs assez peu change depuis une vingtaine d’annees. Notre plaisir ? C’est votre jean taille 36. Notre honte ? Etre choses Г  savoir quand on sort avec un espagnol celibataire a 30 annees. Notre pire angoisse ? Ne point reussir a se caser avant 40 annees parce qu’apres on perd toute valeur via « le marche d’une bonne meuf » comme dit Virginie Despentes. La reussite ? Rentrer dans un jean en taille 36. Cela disait Bridget Jones en 1996 n’a jamais pris une ride… aussi si la conscience feministe de l’autrice sait bien que ces regles ne viennent pas d’elle et que plus elle tente de s’ajuster a cet ideal patriarcal, moins elle se respecte. Peut-etre que l’element qui manque a son recit, c’est la prise de conscience de sa dimension tres situee : cette histoire est precisement celle d’une Parisienne blanche trentenaire qui a fera des etudes superieures. Ses contraintes, ses angoisses, ses loisirs et ses libertes seront etroitement lies a sa position sociale. Elle raconte sa propre histoire, mais sans avoir explicitement conscience que une telle histoire reste liee a sa categorie socioprofessionnelle et a son age. Cela Notre choque le plus, dans son enquete sur Tinder, c’est claque que l’application lui attribue une note de desirabilite, un score qui est secret et qui conditionne le type de profil qui lui sera propose. Tinder fait se rencontrer des joueurs de memes forces, c’est-a-dire des individus evaluees comme egalement desirables, mais Tinder ne communique pas a ses client-es la note qui leur attribue. Une partie de l’enquete de Judith Duportail va etre motivee par la decouverte de une telle note. Pourtant, nous allons voir qu’il ne s’agit que d’un detail d’la strategie de Tinder.

Du livre l’amour sous algorithme editionsgouttedor

L’histoire dont je vais parler dans ce post, c’est l’autre, celle de Tinder et des applications de rencontre. Judith Duportail n’est la seule a la raconter. Elle a bon nombre ete aidee par Jessica Pidoux, doctorante a l’universite de Lausanne. A l’origine des travaux de Jessica Pidoux, il y a une idee toute simple. Quels paraissent les brevets ayant ete deposes par Tinder et qui seront donc a l’origine de le fonctionnement ? Les entreprises repetent tellement que leurs algorithmes sont secrets qu’on finit avec les croire. Pourtant, quand on depose une idee pour qu’on ne vous la vole gui?re, il convient bien la decrire. En somme, une bonne partie du mystere est accessible sur Internet, le est, c’est de l’analyse sociologique. En preambule, je tiens a preciser que je n’ai rien contre Le concept des applications de rencontres, que votre soit Afin de rechercher une rencontre ephemere ou un partenaire de longue duree. Choisir une telle appli, c’est votre possible pour bouger de l’entre-soi, Afin de eviter de devoir draguer via son lieu de travail, Afin de eviter de transformer tous ses loisirs en possible terrain de chasse. C’est aussi un moyen de faire de l’entre-soi : approcher des personnes ayant la meme religion ou analogues valeurs sociales comme nos applications qui ciblent des individus avec un mode de vie ecologique et decroissant. Et enfin, c’est un moyen de s’amuser avec sa sexualite. Mon seul probleme, avec ces applications, c’est leur opacite, d’une part, et leur cote addictif d’autre part… non nullement addictif a Notre rencontre, mais a l’application elle-meme. Un fonctionnement avec lequel les utilisateurs et utilisatrices ne semblent nullement familiers, faute d’avoir ete averti-es (voire forme-es) et sur lesquels les applications se gardent de communiquer.

Mes applications de rencontre : de grosses machines a sous Tout part d’un malentendu : on croit, a tort, que le but premier de Tinder ainsi que ses clones est de nous permettre d’effectuer des rencontres. Il n’en est que dalle : un but est de rapporter de l’argent. Les rencontres seront juste le moyen d’y parvenir. Comment monetiser avantageusement ce type de site ? Comme nombre d’autres sites, Tinder est gratuit mais vend des fonctionnalites qui permettent a la version gratuite d’etre plus performante. Tinder ne veut jamais vous faire approcher l’amour, car votre pourrait i?tre la mort de son fonds de commerce. D’ailleurs, il ne s’est jamais positionne concernant le creneau d’une rencontre « pour notre vie » mais plutot du « coup d’un soir » ou du « plan cul » : ce paraissent des experiences qu’on va reiterer sans fin et rapidement, contrairement a Notre relation amoureuse sexuellement exclusive, qui n’est absolument pas « bankable ».

L’autre moyen enfile en ?uvre par Tinder pour gagner de l’argent est de transformer ses utilisateurs-trices en produit. A la connexion, Tinder deploie un certain nombre de subterfuges pour collecter le plus de donnees vous au sujet de. Cela vous invite a lui apporter les cles de ce compte Facebook, Afin de eviter de presenter votre profil a ces amis-es. Cela vous propose, via Spotify, de mettre en lien votre chanson preferee, car sa musique est votre excellent possible d’entamer la conversation. Enfin, il vous invite a connecter ce compte a Instagram ou il y a des tonnes de photos geniales qui vous permettront de vous mettre en valeur. Prevenant, Tinder ? Disons plutot qu’il se comporte comme un formidable aspirateur, engrangeant tout ce qu’il peut attraper et utilisant une infime partie de ces renseignements pour son activite « vitrine » : vous aider a rentrer en relation au milieu des inconnu-es qui vous ressemblent. On peut neanmoins utiliser Tinder en fournissant le strict minimum d’informations : pour utiliser l’application, vous avez seulement besoin de mettre votre numero de telephone (qui ne sera pas communique), un pseudo, la age, sexe et localisation. Puis, vous indiquez le sexe des personnes recherchees, un tranche d’age et J’ai distance maximum a laquelle elles doivent habiter. Ensuite, l’application vous demande de charger 2 photos pouvant representer n’importe quoi (vous pouvez meme mettre un cliche noire), et c’est parti.

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